ENTRETIEN EXCLUSIF AVEC PHILIPPE FAUCON
ENTRETIEN EXCLUSIF AVEC PHILIPPE FAUCON REALISATEUR ET PRODUCTEUR DU FILM « FATIMA »
A l’issue de la Première de son film FATIMA au Cinéma3 Casino de Gardanne qui a ouvert vendredi avec brio le 27è Festival du cinéma d’automne de Gardanne, Philippe Faucon réalisateur et producteur du Film a accordé à Reporters.dz un entretien exclusif pour parler de son film, de ses comédiens et de sa filmographie en présence de Cerise Jouinot nouvelle directrice du cinéma depuis février 2015 et organisatrice de cette remarquable édition attendue par tout un public.
Reporters.dz : En tant que réalisateur et d’après votre filmographie importante par ailleurs, vous vous êtes toujours préoccupé des sujets de société souvent propices à débat- l’amour, le Sida, l’homosexualité, la guerre d’Algérie-, le drame en général. Qu’est ce que vous voulez en fait révéler à travers vos films ?
P.Faucon : On s’étonne souvent que je filme ces populations où je me reconnais d’ailleurs. C’est tout mon environnement social. Les sujets que je réalisé sont le résultat de cette expérience. Ce sont des sujets que je connais le plus pour en parler sans pour autant en devenir un spécialiste. Mon seul projet est d’en sortir des choses formidables qu’on peut aussi entendre. C’est ce que j’essaie de révéler le plus dans des films qui peuvent apporter de l’émotion et surtout de la compréhension.
Reporters .dz: Le réalisateur que vous êtes ne va t-il pas être plutôt cantonné- dans des films aux sujets à caractère maghrébin de par le choix des scénarios, des comédiens, des dialogues à l’exemple des films de Samia, Sabine, les Etrangers, la Trahison ou la désintégration…
P .Faucon: Sincèrement non. C’est mon environnement proche qui parle pour moi. Mon parcours personnel y compris familial m’aide à avoir cette vision particulière sur tous ces sujets sensibles qui touchent particulièrement à la société d’aujourd’hui.
Je suis né à Oujda-Maroc- je suis petit fils d’immigré et j’ai suivi mes parents réfugiés d’Espagne en Algérie qui ne parlaient pas français mais espagnol. Arrivés à Marnia d’abord, puis à Alger avant de venir en France faire mes études à Aix en Provence.
Je suis marié à une algérienne qui travaille comme moi pour le cinéma. Tout cela m’inspire. D’où chez moi cette sensibilité et ma facilité d’ approche des problèmes sociétaux existants grâce à ma double appartenance et à cette double culture acquise dans ces milieux des cités dans lesquels j’ai vécu qui ont pour beaucoup favorisé je crois cette relation avec les autres. Sincèrement je pense qu’il ne faut pas hésiter à montrer des situations de la France d’aujourd’hui sur les jeunes, les femmes, le chômage… les quartiers et bien d’autres sujets sensibles que vous avez cités.
Quant aux comédiens repérés, ils sont plus choisis sur leur capacité à jouer des rôles liés aux scénarios par leur sensibilité d’abord et par leur façon d’appréhender leur sujet pour mieux l’incarner. C’est aussi simple que cela.
Reporters.dz : Votre dernier film FATIMA est nettement reconnu par la critique depuis sa sortir le 7 octobre. Etes-vous satisfait de votre travail filmographique avec des comédiens non professionnels?
P.Faucon: Oui totalement. Car c’est beaucoup de travail avec toutes les difficultés qu’on a pour réaliser un film d’autant que dans ce film, le budget étant limité, il fallait compresser le temps de tournage du film qui a duré 2 ans. Même de ce point de vue là je suis très satisfait du résultat.
Reprters.dz : Pourquoi ce choix de FATIMA, cette comédienne qui joue son rôle parfaitement et autour de laquelle tout le sujet du film est centré ?
Faucon: Je me suis inspiré du livre/journal en arabe de Fatima Elayoubi que l’ai lu et apprécié sur sa vie de femme émigrée. Un livre introspectif, plein de réflexions, de poèmes aussi. Et j’ai découvert dans cette lecture quelque chose qui m’a donné envie de rencontrer l’auteure. Une belle personne, déscolarisée à l’âge de 10 ans dont la vie a été complètement orientée. Son journal se raconte sur une période d’une vingtaine d’années. Pour le film, J’ai dû puiser sur la période où sa fille Nesrine débute à l’université de médecine à l’inverse de l’autre sœur qui décroche de l’école .Ce film est inspiré aussi de personnages vivants. Tout comme Soria Zéroual qui même, si elle n’est pas une comédienne professionnelle m’a convaincu par sa force mentale, impressionné par sa concentration durant les essais sur le plateau et par une certaine maitrise pour parvenir à ce rôle et à cette rencontre avec elle même tout au long de ce film. Et le choix de Soria Zéroual s’est imposé de lui même .Elle a pu ainsi donner des choses trop belles sans en faire trop tout en incarnant parfaitement le rôle. Idem pour les filles ou le père d’ailleurs Chawki Ayari qui a joué aussi son rôle avec une certaine et grande aisance.
Reporters.dz : Quel regard portez-vous sur le cinéma actuel du Maghreb en général et algérien en particulier, vous qui connaissez l’Algérie pour y avoir vécu et même tourné en Algérie?
P.Faucon: Le cinéma maghrébin en général est en plein essor surtout au Maroc qui produit assez même si tout n’est pas montré à l’étranger. En Algérie, le cinéma a beaucoup souffert de la décennie noire du terrorisme et malgré ce retard, on voit apparaitre aujourd’hui une nouvelle génération d’acteurs et de réalisateurs et particulièrement des femmes, surtout du coté des binationaux qui montent avec hélas de petits moyens. Les cinéastes maghrébins en général sont beaucoup présents dans les festivals internationaux car ils ont besoin de plus de visibilité sur ce qu’ils réalisent.
Avez-vous d’autres projets de films ou un sujet particulier à produire à l’avenir?
Faucon: Des projets il y en a toujours. Mais il faut des sujets qui s’adaptent à des situations données et des réalités du moment sans tomber dans la fiction. Je vais d’abord prendre le temps de suivre ce film dans son parcours et faire sa promotion parce qu’il est porteur au sens propre de la famille qu’il traite, parce qu’il a du sens tout en étant profond socialement de par son histoire vraie.
De Gardanne;
Entretien réalisé par JACKY NAIDJA
P/Reporters.dz